Assises du logement de la Communauté de communes de l’île de Ré
Aude Cancellier aura impressionné tout le public
réuni dans la grande salle de spectacle de La Maline à La Couarde-sur-Mer, presqu’autant que les comédiens, musiciens et artistes qui d’habitude foulent la scène. Elle n’est pas une artiste, du moins pas au sens où on l’entend normalement, même si elle use de sa compétence indiscutable au dessin.
Son métier : facilitatrice graphique, son rôle : modéliser les discours, les synthétiser et les mettre en dessins et en mots sur du papier. C’était sa mission lors des premières Assises du logement organisées par la Communauté de communes de l’île de Ré. Celles-ci se sont déroulées le 13 octobre dernier, cinq heures durant et ont montré, si nécessaire, que le sujet du logement à l’île de Ré était non seulement fédérateur (la salle était pleine à ras bord, avec des gens assis dans les escaliers), parfois passionnel mais surtout que c’était un sujet à évoquer sous plusieurs prismes : logement social, logement pour les saisonniers, logement permanent et le nœud du problème, logement saisonnier en meublés de tourisme. Car oui, l’île de Ré se vide de ses habitants doucement mais surement, faute d’offres locatives du parc privé (voir les témoignages dans cette vidéo), les propriétaires privilégiant la location à vocation touristique, pour des raisons fiscales et économiques évidentes. Aude Cancellier nous parle de son métier et nous montre comment elle a synthétisé cinq heures d’échanges.
Un sujet mobilisateur
En amont des Assises, un questionnaire a été mis en ligne par la Communauté de communes, « plus de 1200 personnes y ont répondu » s’est réjoui Lionel Quillet, le président de la CDC. Le sujet est mobilisateur, il est même essentiel à l’avenir de l’île de Ré. Ces Assises étaient le fruit d’un long travail préparatoire mené par Peggy Luton, élue communautaire de La Couarde et depuis peu, vice-présidente de la CDC en charge du logement. Et le tour de la question a bien été fait avec des interventions en présentiel du maire de Dinard ou à distance d’un élu du Pays Basque, deux lieux où le problème a été traité bien en amont avec le changement d’usage du bien mis en location.
De nombreuses interventions dans le public aussi pour déplorer les listes d’attente pour des logements sociaux, pour signaler que des jeunes saisonniers se retrouvent à dormir à la belle étoile en juillet et août faute de toit, (il manquerait au minimum 500 lits). Des propriétaires ont pointé du doigt que la location à vocation touristique à la semaine leur permettait de rembourser les emprunts bancaires quand ils avaient acquis des biens pour investir pour leur retraite.
Pas question de faire haro sur les locations de meublés de tourisme, l’économie touristique étant la première de l’île. 4000 meublés sont actuellement référencés officiellement via la taxe de séjour. En revanche, la CDC estime qu’au moins 1000 meublés passent sous les radars de la déclaration fiscale avec la taxe de séjour, ces locations sont précisément dans le viseur des élus. La déclaration d’usage préalable est mise en place dès maintenant.
Régulation, le maître mot
Régulation est le maître mot que Lionel Quillet a souhaité mettre en avant, pour ménager la chèvre et le chou.
Pour le reste, des pistes d’action sont évoquées, un faisceau de solutions, des solutions qui devront passer aussi par des décisions municipales, la majorité de ces solutions relevant des compétences des maires. La patate chaude a été lancée aux premiers magistrats de chacune des dix communes de l’île. Fin novembre, des propositions sur la base de ces pistes d’actions devraient être rendues publiques. Promesse en a été faite.
Des pistes d’actions, un faisceau de solutions
Parmi elles, on retiendra déjà que pour le logement des saisonniers, des constructions devraient voir le jour au Bois-Plage et à Saint-Martin-de-Ré, que les campings dans chaque commune seraient remis au cœur des discussions au moment où se renégocient les délégations de service public (DSP) et pourquoi pas envisager de l’habitat temporaire en zone urbanisée ? une négociation qui ne peut se faire qu’avec l’Etat.
Pour le logement social, outre les projets intercommunaux (au-delà de 20 logements, c’est la CDC qui est maître d’ouvrage), les maires des dix communes sont tous vertement invités à rendre leur copie rapidement en ce qui concerne des projets communaux.
Quant au logement à l’année, finalement le vrai nœud du problème rétais, on est loin de faire le pas que vient de franchir la ville de La Rochelle (lire par ailleurs) avec la nouvelle réglementation pour l’encadrement des meublés de tourisme. La délibération rochelaise a été votée à l’unanimité le 20 octobre dernier en conseil communautaire. A La Rochelle, c’est la crise du logement étudiant qui a été le déclencheur de cette prise de conscience. La face visible de l’iceberg.
A l’île de Ré, il reste quelques obstacles à franchir : être déclarée en zone tendue par la préfecture et l’appui des parlementaires pour une évolution législative, afin que, dans les zones touristiques comme sur l’île de Ré mais aussi sur tout le littoral, les avantages fiscaux aillent aux propriétaires qui louent à l’année et non à ceux qui louent à la semaine. Olivier Falorni le député a promis de s’y atteler afin que l’île de Ré soit non seulement « l’île aux volets verts mais aussi l’île aux volets ouverts ». La formule claque.
De l’autre côté du pont
Ce qu’il faut retenir de ce qui a été voté à La Rochelle le 20 octobre
-La location de courte durée est limitée à un seul logement par personne
-La location de courte durée est interdite pour des logements de moins de 35m2
-Le principe de compensation s’applique pour les logements de plus de 35 m2 dans les secteurs du centre-ville et des Minimes
-Pour les personnes physiques, il est toujours possible de louer son bien en location mixte (neuf mois à un étudiant, trois mois l’été en location de courte durée) ainsi que son meublé associé à sa résidence principale
-L’encadrement de la location de courte durée s’applique dorénavant aux personnes morales (les Sociétés civiles immobilières notamment)
-Pour les résidences principales, le dispositif de 120 jours reste en vigueur (120 jours de locations de courte durée seulement).
-Marie Nédellec, l’élue rochelaise (PS) qui a préparé cette délibération estime au minimum à 600, le nombre de logements à la location à l’année qui vont revenir sur le marché à partir de juin 2023, date à partir de laquelle cette réglementation sera appliquée.
Virginie Valadas