Parc éolien marin
Recours en contentieux ou pas ?
Les associations et collectifs (comme le collectif Nemo) qui n’avaient pas manqué d’exprimer leur hostilité au projet de parc éolien marin au large de l’île d’Oléron semblent être dans l’expectative des prochaines étapes. Plus de dix jours après la décision officielle de l’état, seule la LPO (Ligue de protection des Oiseaux) a rendu public un communiqué de presse officiel pour critiquer cette décision, mais sans pour autant évoquer le possible recours à ses avocats.
L’information est passée au Journal Officiel du 29 juillet 2022. L’Etat a donc acté la création de deux parcs éoliens marins au large de l’île d’Oléron. Le gouvernement, par la voie de trois de ses ministres (Transition écologique et Cohésion des territoires, Transition énergétique et secrétaire d’Etat à la Mer) a retenu les zones pour l’implantation du projet des deux parcs en tenant compte des conclusions du débat public. Deux zones d’implantation sont ciblées, toutes les deux en dehors du périmètre du Parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis, un espace protégé de 6500 km2.
L’un des principaux arguments avancés par les nombreux opposants (le collectif Nemo pour Non à l’éolien marin au large d’Oléron, la Ligue pour la Protection des Oiseaux…) au projet concernait effectivement la localisation initialement prévue du parc, au cœur de ce territoire sensé être un sanctuaire pour la biodiversité, même si les activités humaines y sont autorisées.
Un débat public très suivi l’hiver dernier
En révisant ainsi sa copie et en tenant compte des conclusions de Chantal Jouanno, la présidente de la CNDP, le gouvernement s’assure de la quasi impossibilité pour les opposants d’avoir recours au contentieux.
Pour mémoire, le débat public organisé d’octobre 2021 à février 2022, a réuni plus de 15000 participants et a donné lieu à 520 avis et questions sur la plateforme dédiée. Même si la très grande majorité de ses avis étaient défavorables au projet, la commission particulière du débat préconisait un éloignement des côtes du projet et une concertation avec la population et les associations dans toutes les étapes à venir : élaboration des cahiers des charges des procédures de mise en concurrence, propositions de mesures pour limiter les impacts sur la pêche etc ;
Un premier parc effectif en 2030, un deuxième parc d’éolien flottant
Concrètement, les prochaines échéances sont annoncées : pour le premier parc, le gouvernement lancera un dialogue concurrentiel dès 2022, avec l’objectif de désigner le lauréat début 2024 en vue d’une mise en service au début des années 2030. Ce premier parc éolien posé, d’une capacité d’environ 1000 MW, pourra être complété ultérieurement d’un second parc d’au plus 1000 MW.
Ce second parc pourra être situé encore plus au large avec une technologie qui pourra être flottante ou posée en fonction d’études préalables qui démarreront simultanément au premier parc. Au total, ils permettront de produire un volume d’électricité équivalent à la consommation électrique d’un million six cent mille habitants environ, soit plus du double de la population de Charente-Maritime.
Infos pratiques
Tous les projets de parcs éoliens marins français, dont le projet de parc éolien marin de Nouvelle Aquitaine rebaptisé parc éolien marin sud atlantique sont présentés de manière détaillée sur le site suivant :
https://www.eoliennesenmer.fr/
Pour l’Etat, le projet oléronais se distingue
des autres projets de parcs éoliens en mer existants. C’est un projet innovant d’un point de vue technique et du point de vue de la concertation avec les publics également. Du moins, c’est ce qui est écrit sur le papier, dans le communiqué de presse diffusé par le ministère de la Transition écologique : « il s’agit de faire d’Oléron un projet innovant, implanté plus loin des côtes que les projets éoliens posés existants. En effet, la réalisation de ce premier projet à plus de 60 mètres constitue un défi technologique, qui, en cas de succès, dégagera un nouveau potentiel de localisation des projets permettant de mieux concilier les usages (énergie, biodiversité, pêche) ; et d’Informer régulièrement le public sur l’avancement du projet sur le site internet national d’information (…) »
Pour la LPO, une menace de l’aire marine protégée
La Ligue de Protection des Oiseaux (la LPO que préside Allain Bougrain Dubourg) a été la première à réagir officiellement avec un communiqué de presse. Il y est stipulé que ce projet est une menace pour les oiseaux et pour la biodiversité au sein de l’aire marine protégée : « En validant la poursuite d’un projet industriel de cette ampleur au cœur d’une zone de protection spéciale des oiseaux, l’Etat remise au second plan les enjeux de préservation de la biodiversité (…) Si la zone d’implantation choisie par l’État se situe désormais en dehors du Parc naturel marin (PNM), elle reste néanmoins située au cœur de la Zone de protection spéciale (ZPS) « Pertuis Charentais – Rochebonne », une Aire marine protégée créée en raison de sa richesse écologique et de l’existence de voies de déplacement des oiseaux entre les zones de stationnement au large et le continent, ainsi que sur des couloirs migratoires nord-sud d’importance internationale.
En conclusion, la LPO demande de nouveau à l’état de revoir sa copie, en envisageant la technologie de l’éolien flottant pour les deux parcs : « La LPO demande à ce que la technologie éolienne flottante soit envisagée dès maintenant pour l’implantation de parcs marins en Atlantique Sud, en s’affranchissant des contraintes bathymétriques. Cette option permettrait de déplacer le projet en dehors des routes migratoire identifiées et de la zone de protection spéciale, et ainsi de mieux protéger la biodiversité associée. »
Dominique Chevillon, co-fondateur du collectif Nemo (Non à l’éolien marin au large d’Oléron) s’est exprimé dans les colonnes de nos confrères du Phare de Ré. Il y évoque un match aller qui se termine avec des aberrations qui viennent de disparaître et un match retour qui commence avec des futures discussions pied à pied avec l’état… » Seul le maire de Saint-Pierre d’Oléron et conseiller départemental Christophe Sueur n’exclut pas un éventuel recours et reste fondamentalement opposé au projet.
Le prochain combat qui se profile, pour les publics et les associations, sera de convaincre l’état d’installer non pas un, mais deux parcs d’éolien flottant et au large, bien au large. Encore faudra-t-il pour cela que la technologie soit totalement au point et sans doute un peu moins coûteuse.
Virginie Valadas