Patrimoine en péril
Les écluses à poisson constituent
un patrimoine unique, marin et vernaculaire de l’île de Ré. Ces pêcheries construites de pierres sèches récoltées sur l’estran découvrent à marée basse leur forme si particulière en fer à cheval sur au minimum 500m. Au début du siècle dernier, elles étaient plus d’une centaine à être encore debout pour permettre aux co-détenteurs de venir y recueillir les poissons et les coquillages qui s’étaient fait piéger pendant la maline. Aujourd’hui, quinze écluses témoignent de cette pratique de pêche qui remonterait au début du XIe siècle. Maintenant, elles ne constituent plus un moyen de se nourrir pour les co-détenteurs, mais en revanche, elles sont une curiosité pour les visiteurs et les vacanciers. Que serait l’île de Ré sans ses écluses ?
Parmi elles, une des plus emblématique est celle de Moufette située au pied du phare des Baleines.
Las, l’écluse Moufette, l’une des plus grande de l’île de Ré, subit chaque hiver les coups de tabac et les aléas météorologiques. Son emplacement stratégique la rend particulièrement fragilisée aux flux et aux reflux de la houle quand la mer se démonte.
L’association des amis de Moufette rassemble quelques bénévoles retraités de plusieurs communes de l’île de Ré qui consacrent beaucoup de leur temps et de leur énergie à venir combler les brèches de l’écluse à chaque coup de vent hivernal un peu violent. C’est dire que pendant le mois de décembre qui s’achève, ces passionnés de l’écluse Moufette n’ont pas chômé.
Mais cette mobilisation n’est plus suffisante et les Amis de l’écluse Moufette lancent un SOS pour recruter d’autres bénévoles, notamment au nord de l’île afin d’assurer une surveillance quotidienne de l’écluse en hiver. Les Amis de Moufette aimeraient également transmettre leur savoir faire de construction et de réparation de l’écluse à des plus jeunes générations, afin d’assurer la pérennité de ce patrimoine si typique de l’île de Ré.
Infos pratiques
Les amis de l’écluse Moufette
- Saint-Clément-des-Baleines
E-mail : ecluse.moufette@gmail.com
Moufette a résisté à plus de 1000 ans d’existence, mais aujourd’hui
Moufette est en péril.
C’est pourquoi nous publions le message du secrétaire de l’association des Amis de Moufette :
« Que sera le site du Phare des Baleines sans l’écluse Moufette à ses pieds ?
Tout visiteur du site du Phare des Baleines à St Clément est irrésistiblement saisi par la beauté singulière du tracé de l’écluse, ce mur de pierres sèches qui constitue la plus grand – et assurément la plus belle – des 15 pêcheries qui subsistent autour de l’île de Ré. Faut-il rappeler que ces pêcheries constituent un élément indissociable du patrimoine culturel et historique de l’île, la marque visible du lien quasi charnel qui unissait les Rétais à leur île et à l’océan ?
Bien sûr, la finalité était tout d’abord alimentaire, et l’appauvrissement de la mer fait aujourd’hui passer cet aspect à l’arrière-plan, et les écluses seront bien impuissantes à elles seules à protéger la côte face aux conséquences du réchauffement climatique.
Mais elles restent la trace de cette opiniâtreté et de ce courage, et surtout de l’esprit de solidarité qui poussait les villageois à concourir à leur entretien.
Les écluses existent depuis plus de mille ans, et Moufette notamment aura survécu à bien des tempêtes et à la fureur des hommes. Après la deuxième guerre mondiale, pendant laquelle l’intransigeance de l’occupant en avait interdit l’entretien, elle a été reconstruite.
Ni Martin ou Luthar, Xynthia, ou Karl n’en sont venus à bout !
Mais aujourd’hui, elle est en péril ! Dramatiquement.
L’âge, les problèmes de santé des uns ou des autres, des départs et des défections ont réduit notre équipe d’entretien comme peau de chagrin.
Malgré nos efforts et notre bonne volonté, et alors que seule une intervention rapide pourrait empêcher l’aggravation, nous devons admettre que nous ne parvenons plus à réparer suffisamment vite les brèches causées par les tempêtes successives, et à chaque attaque, le mur souffre davantage et se défait, comme la maille d’un tricot.
Pour dire les choses un peu brutalement, à ce rythme, d’ici deux ou trois tempêtes, de Moufette il ne subsistera qu’une trace, un vague souvenir, et sans doute collectivement un grand regret.
Le patrimoine de l’île se sera appauvri de façon irrémédiable, et le site aura perdu ce qui depuis des lustres lui conférait cette beauté singulière !
Peut-être est-il encore possible d’éviter le pire, si nous parvenons à compléter notre équipe par de nouveaux membres suffisamment décidés et volontaires, prêts à sacrifier une ou deux demies journées par semaine, en fonction des horaires des marées (nous ne pouvons intervenir qu’à marée basse, en gros pendant 3 heures, selon les coefficients).
Moufette donne son cachet au site, mais elle ne peut plus se contenter de ses admirateurs ou des déclarations de soutien, aussi sympathiques soient-ils.
Elle a très prosaïquement besoin de bras.
Les vôtres sans doute, et toutes les bonnes volontés seront les bienvenues… »
Jean W Wiesel. photos de JWW également.